L’humoriste controversé s’était produit à Roubaix et à La Chapelle d’Armentières via de sociétés tampons qui ne mentionnaient pas son nom. Pris au piège, les directeurs de salles avaient découvert la supercherie. Mais trop tard.
Boycotté depuis plusieurs années par le monde du spectacle pour ses prises de positions extrêmes, et ses multiples condamnations judiciaires portant sur des faits de « provocation à la haine raciale, et d’injures antisémites », Dieudonné M’Bala M’Bala, s’était engouffré dans une brèche début 2018 afin de se produire, au nez et à la barbe des élus, dans deux salles de la région lilloise. Ses spectacles s’étaient déroulés sans qu’aucun des programmateurs concernés, ceux de La Condition Publique (à Roubaix où deux représentations avaient été données le même soir) et des salons Kennedy (à La Chapelle d’Armentières) n’aient donné leur accord à l’accueil de l’artiste, âgé de 52 ans à l’époque. Et pour cause : les réservations effectuées par deux sociétés complices n’avaient pas mentionné le nom de Dieudonné.
Le stratagème a donné lieu à des poursuites : après décision du parquet de Lille, celles-ci aboutiront à un procès en correctionnel en janvier 2021 à Lille où le protagoniste comparaîtra avec sa compagne, soupçonné d’être très impliquée dans l’affaire, pour « escroquerie et recel d’escroquerie ».
Risque d’emprisonnement
Que s’était-il précisément passé ? Le 28 janvier 2018, plusieurs centaines de personnes se sont pressées en fin d’après-midi (peu avant 18 heures) aux portes de la Condition Publique, une fabrique culturelle à Roubaix. Ce soir-là, le lieu devait accueillir un événement autour d’une présentation de produits cosmétiques, tel que l’avait annoncé l’Esprit de la Forêt, une société de communication gérée à l’époque par…Noémie Montagne, qui n’est autre que l’épouse de Dieudonné (depuis 2017). C’est cette entreprise qui avait loué la salle, sans jamais prononcer le nom de l’humoriste controversé. Le directeur de la structure a compris la supercherie, mais bien trop tard pour tout annuler : au regard de l’affluence, les décisionnaires avaient préféré maintenir l’évènement « afin de garantir la sécurité des personnes arrivées sur place » et éviter le risque de désordres dans le quartier. Non sans qu’un dépôt de plainte ait été déposé par le propriétaire de La Condition Publique.
La même combine avait été utilisée quelques jours plus tard à La Chapelle d’Armentières où Dieudonné est parvenu à se produire avec la complicité de sa compagne : cette dernière avait effectué la réservation au nom d’une autre de ses sociétés, les Productions de la Plume. Là aussi, le piège s’était refermé sur les programmateurs des « salons Kennedy ».
Le procès se tiendra le 14 janvier prochain à Lille. Les deux prévenus risquent jusqu’à 5 ans d’emprisonnement et 375 000 euros d’amende.